On m’a dit qu’à l’époque de Jules Verne, on envoyait les personnes en mal de vivre, faire le tour du monde pour qu’elles trouvent leur centre. J’ai pensé faire le tour en traçant un trait, c’est arriver au cercle et savoir où l’on se situe par rapport à lui.
C’est l’aspect obsessionnel de mon travail, la recherche sans fin, mon doux acharnement à disséquer l’indissécable qui m’ont conduite à envisager ce projet comme une juste continuité.
Au départ il y a le point A (Marseille); à l’arrivée, il y a le point A. Entre il y a eu l’expérience radicale du trait qui tend au cercle.
«L’absence de cercle est maladive pudeur du trait» E. Jabès. De A à A naît le film.
J’ai filmé pendant un an, un homme traçant un trait partout où il passait.
«La vie est un continuum sans commencement ni fin. Elle n’avance pas vers un but ultime. C’est une déambulation, un pèlerinage qui est sa propre raison d’être, une danse sans autre justification que le plaisir de danser». O. Rajnesh.
L’expérience liée à l’espace et au temps a été nourri quotidiennement par ce que nous sommes (celle qui filme, celui qui est filmé), ce que nous découvrons et qui nous modifie, ce que nous devenons. J’ai souhaité pour cela, filmer et monter au fur et à mesure du voyage.
Le discours selon lequel les artistes produisent pour laisser une trace de leur passage ne résonne pas en moi.
Parler de peinture en choisissant de tracer un trait à la craie ou tout autre matériau qui s’efface; ne pas résister au temps; s’inscrire dans l’instant et disparaître; ne pas peindre pour ne pas rester. Tracer l’éphémère.
La vidéo ou l’appareil photo sont les observateurs de l’action de tracer.